Comme nous l’avons déjà remarqué à plusieurs reprises, les anciens photographes ne détestaient pas pointer leur objectif sur des sujets pouvant attirer une curiosité malsaine et faire vendre plus de cartes postales dans leurs échoppes.
Voici une photographie qui plonge dans le quotidien d’un sous-prolétariat rural dont la mémoire serait perdue si nous ne disposions pas de ces rares clichés dérangeants, mais fichtrement instructifs.
La légende, cruellement ironique, laisse peu de doute sur l’authenticité de la situation sociale des sujets. Une femme d’âge indéterminé fait la cuisine sur un poêle à bois à l’extérieur d’une masure minuscule faite de planches mal équarries. La maison semble construite au bord d’une route ou du canal, près d’un fossé. Le toit est recouvert de ce qui ressemble à des bouts de bâches ou des peaux. Des tas de terre assurent le rôle de faîtières. Un tuyau sort du toit. Son diamètre similaire à celui du poêle laisse penser que celui ci chauffe la masure en hiver. Du linge sèche étendu sur les buissons. Quatre enfants proches en âge posent, assis sur le sol.
Il est légitime de s' interroger sur la réalité de la situation de ces gens. Les cartes postales anciennes sont parfois si caricaturales qu’on repère très vite le caractère exagéré de certaines scènes, montées de toutes pièces pour complaire à un public friand de caricatures peu subtiles.
S’agit-il d’une mise en scène? C’est possible, mais d’autres photographies contemporaines montrent des situations précaires et misérables caractéristiques du milieu des mariniers ou des charbonniers, entre autres. La masure de Sancoins peut être, hélas, authentique.
© Olivier Trotignon 2015